Il était une fois, les capteurs magiques

Il était une fois, les capteurs magiques

IL ÉTAIT UNE FOIS…

les capteurs magiques

Asten Event 2022 - photo de groupe

— Maman, raconte-moi l’histoire des capteurs magiques !
— D’accord, mon cœur. Mais tu sais, depuis quelques temps, elle n’a plus vraiment de fin heureuse…

Un rêve et de belles promesses

Il était une fois, un monde singulier : le Royaume de l’Insulinodépendance. Au sein de cette contrée étrange, les habitants ne produisaient plus leur propre insuline.

— Comme toi ? Ils devaient tout calculer et se faire des piqures alors ?
— Oui, l’insuline est essentielle. Si on n’en produit pas, on se doit de connaitre nos besoins et s’injecter la bonne quantité d’insuline pour rester en vie.

Leur vie n’était pas de tout repos… Parfois, ils avaient trop de sucre dans le sang, et ils avaient très soif. Parfois, ils manquaient de sucre dans le sang, et il leur fallait alors se resucrer. Pour le savoir, le seul moyen était de se piquer le bout du doigt, et de placer la goutte dans un artefact magique. C’était douloureux et vraiment pas pratique, mais il fallait le faire au moins 4 ou 5 fois par jour.

— C’est pour ça que tu râles quand tu dois te piquer ?
— Oui… J’ai eu tant de petits trous que mes doigts ressemblaient à des cartes de constellation.

Mais un jour, deux grands magiciens vinrent bouleverser le destin du Royaume.
Le premier se nommait Abbott. D’un geste élégant, il présenta un médaillon blanc à insérer sur la peau. Ce capteur, dit-il, murmureraient à l’oreille des habitants la vérité sur leur sucre intérieur. Et il sauverait bien des nuits de sommeil.

Plus besoin de se piquer. Plus besoin de réveiller les enfants. Un simple coup d’œil, et le taux s’affichait, comme par magie. Les habitants du Royaume n’en crurent pas leurs yeux. Le soulagement fut immense. Et les promesses nombreuses.

Puis vint Dexcom, le deuxième mage. Il proposa quant à lui une navette légèrement plus grande, mais plus précise. En effet, il arrivait fréquemment au petit médaillon d’Abbott de ne pas réussir à donner des résultats aussi fiables que les piqures au bout du doigt.

Certains choisirent alors la navette, d’autres restèrent avec le petit médaillon.

Il y avait bien un autre enchanteur, Medtronic, avec son capteur coquillage. Mais ce dernier n’acceptait de partager ses inventions qu’avec les porteurs de sa propre magie, un cercle restreint.

Prémices de la magie noire

— Et alors ? Tout le monde était heureux ?
— Presque. Parce que la magie, parfois, monte à la tête…

Un jour, des habitants remarquèrent des brûlures là où le médaillon blanc reposait. Des cloques, des démangeaisons, des marques douloureuses. Ils demandèrent au mage Abbott de révéler ce qu’il mettait dans ses artefacts. Mais Abbott refusa. La recette, disait-il, relevait du secret sacré.

— Mais c’est pas gentil ça !
— Non, mon cœur. Et le plus triste, c’est qu’il avait changé d’ingrédient sans prévenir. Quand les réactions sont devenues trop nombreuses, il a été contraint de revenir en arrière.

Ce jour-là, les habitants du Royaume comprirent une chose essentielle : Toute magie, quand elle devient trop puissante… finit par corrompre son enchanteur.

Et pourtant, ils n’avaient encore rien vu.

L’impact des capteurs magiques

Les années passèrent, et chacun des mages affina ses artefacts. Le médaillon blanc n’avait plus besoin d’être effleuré pour révéler ses secrets. La navette, quant à elle, devint plus facile à poser, sans rien perdre de sa précision légendaire.

Le Royaume s’habitua à cette magie. On l’enseignait aux jeunes. On l’utilisait même sur les tout-petits. Les habitants purent être en meilleure santé, et vivre plus sereinement qu’avant. Ou presque.

Car rapidement, un nouveau comportement fit son apparition dans le Royaume : le contrôle absolu. Petit à petit, l’insouciance d’antan s’effaça. Les habitants commencèrent à scruter leur écran magique à tout instant. À guetter la moindre variation, la plus petite montée, le plus discret des décrochages.

On glorifia les courbes parfaites, droites comme un sifflet royal. On inventa même un mot pour désigner la glycémie rêvée : la licorne.

— Pourquoi tu ris ?
— Hier, j’ai dit à Papa que tu passais plus de temps à regarder ta glycémie… qu’à jouer sur ton téléphone.

Et la magie se brisa

Tout le monde attendait que les mages améliorent leurs capteurs magiques en les rendant encore plus discrets. Et un jour, l’annonce tant attendue arriva ! Ils avaient inventé une nouvelle génération de capteurs. Plus petits. Plus fins. Plus beaux. Et surtout, encore plus magiques.

Les habitants du Royaume se réjouirent d’avance. Après tout, si les capteurs étaient déjà si efficaces, cette nouvelle version serait forcément plus performante, non ?

— C’est comme quand il y a une suite d’un bon film ?
— Oui, exactement. Mais cette fois, la suite n’a pas tenu ses promesses…

Des tests avaient été réalisés dans leurs Tours magiques respectives, et les résultats étaient époustouflants. Alors, les habitants du Royaume accueillirent les nouveaux capteurs avec confiance.

Mais très vite… la magie se fissura.

Le médaillon affichait des erreurs lorsque les variations étaient trop importantes à son goût, tandis que la navette affichait de faux résultats dès lors qu’elle était un peu comprimée.

La réception des données était moins fluides. Il y avait des chiffres qui montaient trop vite, ou descendaient sans prévenir, indépendamment de la réalité du taux de sucre des habitants. Des alertes pour rien. Des variations sans queue ni tête. Il fallait à nouveau sortir l’ancien artefact piquant pour vérifier à l’ancienne.

— Et toi ? Tu les as testés ?
— Oui, c’est une nouvelle génération que je porte. Je ne lui fais plus vraiment confiance.

Le doute s’installa dans le Royaume. Pourquoi ces capteurs tout neufs étaient-ils moins fiables que les anciens ? Pourquoi fallait-il à nouveau calibrer, vérifier, corriger ? Et quel intérêt d’avoir un capteur petit et mignon, s’il ne disait pas vrai ?

Les réponses étaient évidentes… et elles n’étaient pas magiques.

Ces capteurs étaient simplement moins coûteux à produire. Et donc plus rentables. Même ceux qui utilisaient les Boucles Magiques, autrefois parfaitement compatibles avec la navette, virent l’étau se resserrer. Les anciens capteurs disparaissaient peu à peu, et aucun mage ne voulait admettre que la qualité baissait.

Alors ils redoublèrent d’efforts. De belles images. De grands discours. De belles promesses.

— Ça s’appelle du Marketing, Maman.
— Je suis surprise que tu connaisses ce mot, mais tu as raison. C’était du très beau marketing.

L’ultime trahison

Mais ce ne fut pas la dernière désillusion. Ce qui arriva ensuite acheva de révéler le vrai visage des mages.

Une étrange vague s’était propagée dans le Royaume voisin, celui des Moldus, ces gens dont les pancréas fonctionnaient encore. Là-bas, certains avaient commencé à poser des capteurs sur leur bras pour suivre leur taux de sucre, alors qu’ils n’étaient pas malades. Ils pensaient que cela améliorerait leur santé.

— Mais pourquoi ?!
— Parce qu’un jour, quelqu’un de charismatique a dit que c’était bien.
— Mais quand même, ils l’on cru ?!
— Tu l’as dit toi-même trésor, le Marketing.

Les voix du Royaume s’élevèrent. Des associations de patients, des médecins, des soignants alertèrent. Cette mode ridicule mettait la santé mentale des Moldus en danger, et humiliait les habitants du Royaume de l’Insulinodépendance. Ces capteurs, autrefois outils de survie, devenaient des gadgets de bien-être.

Les ruptures de stock se multiplièrent. Les mages ne semblaient plus faire de différence entre un besoin vital et une tendance. Puis le Royaume vota des lois pour protéger les siens. Il fut plus difficile voir impossible pour les Moldus de venir voler dans leur stocks.

Et c’est alors qu’au lieu de soutenir leur Royaume… les mages choisirent une autre voie.

Ils créèrent de nouveaux capteurs adaptés aux Moldus. Ils coûtaient encore mois chers, et contenaient moins d’enchantements. Le mage Abbott nomma le sien Lingo , et le mage Dexcom,  Stelo. Ils expliquèrent que ces artefacts étaient conçus pour de bien-être des Moldus. Mais en réalité, ils visaient surtout… leur porte-monnaie.

— C’est comme s’ils avaient oublié pourquoi ils avaient créé cette magie ?
— Exactement. Les magiciens ne se souciaient plus vraiment du Royaume. Ils voulaient s’enrichir.

Les habitants du Royaume de l’Insulinodépendance comprirent qu’ils avaient été trahis. Qu’ils n’étaient plus le cœur du projet. Que la magie avait changé de camp, et que leur enchanteurs étaient définitivement corrompus.

Et même s’ils savaient qu’ils ne pourraient rien y faire, leur colère gronda dans tout le Royaume.

Morale de l’histoire

— Elle est horrible ton histoire, Maman.
— Je sais mon chéri… J’aurais aimé qu’elle se finisse mieux, moi aussi… Mais l’histoire s’écrit encore.

La mère de l’enfant resta un moment silencieuse, perdue dans ses pensées. Elle aurait tant aimé que Dexcom assume ce qu’ils avaient fait, et améliorent leur nouvelles générations de capteurs pour qu’ils demeurent au moins aussi fiables que le G6. Elle portait un Dexcom One +, depuis que son hôpital lui avait dit que seuls les utilisateurs de boucles fermées pouvaient continuer d’utiliser le Dexcom G6. Sa vie n’avait plus été aussi douce depuis. Et elle savait que le G7, qui présentait les mêmes problèmes, allait même un jour remplacer le G6 en boucle fermée. Il n’y avait pas d’échappatoire.

Elle soupira. Au moins, les FSL avançaient dans le bon sens, mais il semblait difficile pour Abbott de proposer un capteur véritablement précis et fiable dans des conditions de vie réelle…

Certains parlaient du Simplera de Medtronic, mais dans les pays qui l’utilisaient déjà, il ressortait qu’à part sa pose et son design, il n’y avait rien de bien plus précis. Elle espéra secrètement qu’un nouveau capteur émerge sur le marché et restaure l’excellence.

La jeune Maman n’avait jamais été passionnée de technologie. Elle rit intérieurement en se rendant compte de ce qu’elle avait été obligée d’apprendre et du temps qu’elle passait à faire de la veille technologique pour son Diabète…

D’autant plus qu’aujourd’hui, elle n’était plus seule.

—Bon, trêve de conte. Tu choisis lequel alors ? Le médaillon, le coquillage ou la navette ?

L’enfant grimaça. Comment était-il savoir lequel était le mieux ? Surtout après un tel conte ?! Il prit une grande inspiration et pointa du doigt l’image du capteur qu’il trouvait le plus beau.

THE END.

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version sérieuse

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On les croise partout. Dans les commentaires, sur les réseaux sociaux, et même en MP sur Instagram, alors que vous n’aviez rien demandé.
Pas une histoire d’équilibre. Ni de rigueur. Encore moins de glycémies parfaites. Mais d’un discours sec, condescendant, culpabilisant.

Certains DT1 se hissent sur leur courbe lisse comme sur un piédestal, et regardent les autres de haut. Parce qu’ils « contrôlent mieux », et sont en « meilleure santé », pensent-ils.

Je l’appelle la Skinny Gly. Cette tendance toxique qui glorifie la maîtrise absolue du Diabète… et juge ceux qui osent vivre autrement. À la manière d’un petit documentaire animalier, je vous propose d’observer cette étrange espèce. Parce qu’il est temps de remettre les pendules à l’heure, glycémique ou pas.

Pourquoi « Skinny gly » ?

Le parallèle avec le Skinny Tok

Sur TikTok, le #SkinnyTok est une tendance bien connue. Des vidéos de corps filiformes glorifiés, de « what I eat in a day » à base de trois myrtilles et une cuillère de yaourt, avec en bonus des commentaires charmants du type « si t’es pas capable de te contrôler, t’as ce que tu mérites », « tu n’es pas moche, tu es juste grosse ».

Vous l’aurez compris, un discours violent, hiérarchisant : les maigres sont au sommet, les autres doivent se taire et se cacher. Comme si la beauté ne concernait pas tous les corps. Comme si nous devions mériter d’exister. Une folie acceptée par les standards et attentes superficielles de notre société.

Les dérives du bien-être dans le Diabète

Et bien dans notre monde à nous, celui du Diabète, nous avons une version similaire. Je l’ai appelée : la Skinny Gly.

Pas de corps filiformes ici, mais des courbes glycémiques lisses.
On retrouve l’apologie du low carbs, de l’IG bas comme s’il s’agissait d’une hygiène de vie (c’est un outil, on le rappelle), et la suppression de toute forme de flexibilité ou de souplesse.

Et toujours cette même dynamique : Si tu n’as pas de courbe parfaite, c’est que tu ne fais pas assez d’efforts. Donc tu ne mérites pas d’aller bien. D’ailleurs, le veux-tu vraiment ?

Dans le fond, la Skinny Gly n’est pas une histoire de soin, ni de stratégie. Cet article n’est pas une critique envers celles et ceux qui choisissent d’adapter leur mode de vie pour trouver leur équilibre. C’est une dénonciation de la violence morale déguisée en bienveillance.

👉 Ceux qui imposent leur hygiène de vie comme un absolu.
👉 Ceux qui se sentent légitimes à juger la tienne.
👉 Ceux qui, derrière le masque du conseil, t’envoient une bonne dose de honte à digérer (sans glucides bien sûr).

Voilà pourquoi j’ai choisi ce nom.
Parce qu’il fallait nommer ce glissement toxique. Et l’identifier, pour ne plus le subir sans comprendre.

Skinny gly vs Perfectionniste

Maîtriser, oui. Juger, non.

Il faut remettre les choses à leur place : vouloir éviter les hyperglycémies et chercher un certain équilibre, ce n’est pas un problème. C’est même souvent une forme de survie mentale dans un quotidien aussi exigeant que celui du Diabète de type 1.

Certaines personnes choisissent de structurer leur vie autour d’un objectif glycémique très précis. Elles adaptent leur alimentation, leur rythme, leurs relations sociales parfois, pour se sentir mieux dans leur gestion. On appelle cela du perfectionnisme, et ce n’est pas une insulte.

Le perfectionniste n’est pas dans la démonstration. Il sait pourquoi il fait ce qu’il fait. Il connaît ses limites, ses fragilités. Il sait que cette rigueur lui permet de se sentir plus en sécurité, de vivre plus sereinement dans un monde où le flou glycémique peut être un véritable enfer mental.

Mais surtout, il ne se pense pas supérieur.

Il sait ce qu’il traverse, et il a suffisamment de recul pour comprendre que d’autres traversent autre chose.
Il peut lire des témoignages de personnes en pleine détresse avec leur Diabète, compatir, écouter, sans répondre : « Tu n’as qu’à faire comme moi. »

Le perfectionniste ne méprise pas les autres parcours. Il n’est pas dans l’égo, mais dans la stratégie. Il ne cherche pas à évangéliser. Il fait au mieux avec ses propres ressources, et il respecte que d’autres fassent différemment.

Le souci, ce n’est donc pas le contrôle en soi.

Le souci, c’est quand ce besoin de contrôle se transforme en système de valeurs. Quand on hiérarchise les patients selon leurs courbes. Quand on commente, sans avoir été sollicité. Quand on suppose que celui ou celle qui fait autrement est « laxiste », « pas assez investi.e », « dangereux.se ».

C’est là que le perfectionnisme glisse…et devient de la Skinny Gly.

Un mécanisme fragile sous une carapace dure

Quand le contrôle devient un réflexe de survie

La Skinny Gly n’est pas née d’un excès de confiance. Elle naît souvent d’un excès de peur. Peur de l’échec, peur des complications, peur du flou. Et dans une maladie aussi exigeante que le Diabète de type 1, cette peur est légitime.

Alors on compense.
On structure. On calcule. On anticipe. On se construit une forteresse faite de règles strictes, de protocoles millimétrés, d’horaires fixes et de recettes propres. Parce que dans un monde où tout peut basculer à cause d’un détail invisible, cette rigidité donne l’illusion d’une sécurité.

Mais c’est une sécurité conditionnelle. Fragile.
Une sécurité qui repose sur l’idée que tout peut, et doit, être maîtrisé. Et surtout, que toute variation est une menace.

C’est ainsi que certaines personnes finissent par ne plus tolérer la simple idée qu’un autre patient puisse faire autrement. Manger sans peser. Ne pas bouger pour éviter les hypers post-prandiales. Lâcher prise, se rater, parfois. Et… vivre quand même.

Cette différence devient insupportable. Parce qu’elle remet en question un système de croyances qu’on a mis tant d’énergie à construire. Un système où « je contrôle = je fais bien ». Et si « l’autre fait différemment » mais va bien quand même… alors « est-ce que je fais tout ça pour rien ? »

Ce doute est vertigineux.
Alors on contre-attaque : on juge. On méprise. On impose.
Non pas parce qu’on est plus fort, mais parce que la simple existence d’un autre chemin menace la cohérence du nôtre.

La Skinny Gly n’a pas besoin de domination.
Elle a besoin de validation et de valorisation.
Et elle l’obtient en tentant d’écraser les autres voix, où en se confortant auprès de personnes qui vont confirmer que ce qu’ils font est super.

Mais à force de refuser les nuances, on devient dur. Tranchant. Injuste.

Les dangers de la Skinny Gly

Culpabilité, honte et repli sur soi

Il y a la rigueur, et il y a ce qu’on en fait.
La rigueur peut être une boussole personnelle. Elle devient une arme lorsqu’on s’en sert pour viser les autres.

Dans cette logique toxique, l’hyperglycémie devient un aveu de faiblesse. Les plaisirs sucrés ? De l’inconscience. Un ressenti difficile ? Une excuse. Et l’erreur… une faute.

Ce regard porté sur les autres ne laisse aucune place à la nuance, ni à la complexité de nos vécus. Il ignore les maladies mentales, les troubles du comportement alimentaire, la fatigue chronique, les douleurs invisibles, le surmenage, les traumatismes, les parcours de vie… tout ce qui fait qu’on ne peut pas tous tout maîtriser. Tout le temps. Tous les jours. Tout ce qui fait que chacun trouvera un équilibre différent entre contrôle, plaisir de vivre et imprévus.

Et ce regard-là fait mal.
Car il isole. Il culpabilise. Il décourage.
Il pousse certains à ne plus oser parler de leur Diabète.
À cacher leurs galères.
À se taire plutôt que de risquer le jugement d’un « meilleur patient ».

Ce climat toxique n’élève personne. Il asphyxie.

Mais un monde où l’on ne peut plus dire « je galère » sans se faire corriger, ce n’est pas un monde qui soigne. C’est un monde qui exclut.

Quand le contrôle devient une prison

Dans l’univers du Diabète de type 1, la frontière entre rigueur et trouble du comportement alimentaire est plus fine qu’on ne l’imagine (TCA). Et elle est trop souvent franchie, sans même qu’on s’en rende compte.

Les personnes qui glorifient le contrôle absolu, celles qui prônent la Skinny Gly, souffrent très souvent, elles-mêmes, d’un rapport troublé à la nourriture, à leur corps ou à la maîtrise.
Mais dans ce monde où le « contrôle » est valorisé, ces dérives passent inaperçues… voire sont applaudies.

Mais derrière ces gestes « modèles », il y a parfois un mal-être profond, un besoin compulsif de tout cadrer pour ne pas s’effondrer.
Et ce mal-être, au lieu d’être entendu, se transforme en un discours normatif, culpabilisant… qui fait des dégâts. Pour ma part, c’est là que mon empathie s’arrête.

Ne les laissons pas nous couler

La raison pour laquelle je fais cet article, c’est que ces discours nous font du mal. À force d’être exposé·e à cette pression constante, « tu devrais », « t’as qu’à », « c’est pas si compliqué », on finit par croire qu’on est nul·le.
On se juge, on s’en veut, on redouble d’efforts. On commence à restreindre. On anticipe tout. On supprime les aliments « à risque ».
On évite les repas imprévus. On se méfie du gras, du sucre, des féculents. On calcule, on compense, on s’épuise.

Et parfois, on bascule. En plein dans les TCA.

Dans des mécanismes de contrôle extrême qui n’ont plus rien à voir avec la santé, ni mentale, ni physique. C’est très long après pour en sortir…

Diabète & TCA

Les personnes vivant avec un DT1 sont particulièrement vulnérables face aux TCA.

Parce que notre quotidien est fait de chiffres, de données, de corrections. Parce qu’on nous apprend à tout contrôler, sans jamais nous dire quand s’arrêter. Parce que certains discours entretiennent l’idée que la perfection glycémique est non seulement possible, mais attendue.

Or, le vrai équilibre, ce n’est pas l’absence de variation. C’est la capacité à vivre avec. À tolérer un peu de flou, à respirer entre deux courbes, à se respecter sans se surveiller en permanence. Après tout, quel intérêt il y aurait-il à tout avoir sous contrôle si cela nous empêche de VIVRE pleinement ?

Et vous, avez-vous déjà croisé la route d'un Skinny Gly ?

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Skinny Gly, kézako ?

Skinny Gly, kézako ?

On peut les croiser partout. Dans les commentaires sur les réseaux sociaux, et même en MP sur Instagram, alors que vous n’aviez rien demandé.
Insaisissables et souvent inoffensifs au premier abord, ils attendent le moment opportun pour attaquer.

Certains DT1 se hissent sur leur courbe lisse comme sur un piédestal, et regardent les autres de haut. Parce qu’ils « contrôlent mieux », et sont en « meilleure santé », pensent-ils. Ils se complaisent dans un ultra contrôle et recherchent une validation en poussant les autres à les joindre.

Je l’appelle la Skinny Gly. Cette tendance toxique qui glorifie la maîtrise absolue du Diabète… et juge ceux qui osent vivre autrement. Je vous propose ici d’analyser ensemble cette étrange espèce. Parce qu’il est temps d’en parler, pour les reconnaître, et passer notre chemin afin de nous protéger.

« Skinny gly » ?

Le parallèle avec le Skinny Tok

Sur TikTok, le #SkinnyTok est une tendance bien connue. Des vidéos de corps filiformes glorifiés, de « what I eat in a day » à base de trois myrtilles et une cuillère de yaourt, avec en bonus des commentaires charmants du type « si t’es pas capable de te contrôler, t’as ce que tu mérites », « tu n’es pas moche, tu es juste grosse ».

Vous l’aurez compris, un discours violent, hiérarchisant : les maigres sont au sommet, les autres doivent se taire et se cacher. Comme si la beauté ne concernait pas tous les corps. Comme si nous devions mériter d’exister. Une folie acceptée par les standards et attentes superficielles de notre société.

Les dérives du bien-être dans le Diabète

Et bien dans notre monde à nous, celui du Diabète, nous avons une version similaire. Je l’ai appelée : la Skinny Gly.

Pas de corps filiformes ici, mais des courbes glycémiques lisses.
On retrouve l’apologie du low carbs, de l’IG bas comme s’il s’agissait d’une hygiène de vie (c’est un outil, on le rappelle), et la suppression de toute forme de flexibilité ou de souplesse.

Et toujours cette même dynamique : Si tu n’as pas de courbe parfaite, c’est que tu ne fais pas assez d’efforts. Donc tu ne mérites pas d’aller bien. D’ailleurs, le veux-tu vraiment ?

La Skinny Gly n’est pas une histoire de soin, ni de stratégie. Et cet article n’est pas une critique envers celles et ceux qui choisissent d’adapter leur mode de vie pour trouver leur équilibre. C’est une dénonciation de la violence morale déguisée en bienveillance.

👉 Ceux qui imposent leur hygiène de vie comme un absolu.
👉 Ceux qui se sentent légitimes à juger la tienne.
👉 Ceux qui, derrière le masque du conseil, t’envoient une bonne dose de honte à digérer (sans glucides bien sûr).

Voilà pourquoi j’ai choisi ce nom. Parce qu’il fallait nommer ce glissement toxique. Et l’identifier, pour ne plus le subir sans comprendre.

Skinny gly vs Perfectionniste

À ne pas confondre avec les Perfectionnistes

Il faut remettre les choses à leur place : vouloir éviter les hyperglycémies et chercher un certain équilibre, ce n’est pas un problème. C’est même souvent une forme de survie mentale dans un quotidien aussi exigeant que celui du Diabète de type 1.

Il arrive d’ailleurs fréquemment que des DT1 témoignent que leur diagnostic les a finalement poussé à prendre davantage soin d’eux.

Certaines personnes choisissent de structurer leur vie autour d’un objectif glycémique très précis. Elles adaptent leur alimentation, leur rythme, leurs relations sociales parfois, pour se sentir mieux dans leur gestion. On appelle cela du perfectionnisme, et ce n’est pas une insulte.

Le Perfectionniste n’est pas dans la démonstration. Il sait pourquoi il fait ce qu’il fait. Il connaît ses limites, ses fragilités. Il sait que cette rigueur lui permet de se sentir plus en sécurité, de vivre plus sereinement dans un monde où le flou glycémique peut être un véritable enfer mental.

Mais surtout, il ne se pense pas supérieur (ou alors c’est juste un Perfectionniste débile).

Il sait ce qu’il traverse, et il a suffisamment de recul pour comprendre que d’autres traversent autre chose.
Il peut lire des témoignages de personnes en pleine détresse avec leur Diabète, compatir, écouter, sans répondre : « Tu n’as qu’à faire comme moi. »

Le Perfectionniste ne méprise pas les autres parcours. Il n’est pas dans l’égo, mais dans la stratégie. Il ne cherche pas à évangéliser. Il fait au mieux avec ses propres ressources, et il respecte que d’autres fassent différemment.

Le souci, ce n’est donc pas le contrôle en soi.

Le souci, c’est quand ce besoin de contrôle se transforme en système de valeurs. Quand on hiérarchise les patients selon leurs courbes. Quand on commente, sans avoir été sollicité. Quand on suppose que celui ou celle qui fait autrement est « laxiste », « pas assez investi.e », « dangereux.se ».

C’est là que le perfectionnisme glisse…et devient de la Skinny Gly.

Une espèce fragile sous une carapace dure

Autopsie d’un Skinny Gly

La Skinny Gly n’est pas née d’un excès de confiance. Elle naît souvent d’un excès de peur. Peur de l’échec, peur des complications, peur du flou. Et dans une maladie aussi exigeante que le Diabète de type 1, cette peur est légitime.

Alors on compense.
On structure. On calcule. On anticipe. On se construit une forteresse faite de règles strictes, de protocoles millimétrés, d’horaires fixes et de recettes propres. Parce que dans un monde où tout peut basculer à cause d’un détail invisible, cette rigidité donne l’illusion d’une sécurité.

Mais c’est une sécurité conditionnelle. Fragile.
Une sécurité qui repose sur l’idée que tout peut, et doit, être maîtrisé. Et surtout, que toute variation est une menace.

C’est ainsi que certaines personnes finissent par ne plus tolérer la simple idée qu’un autre patient puisse faire autrement. Manger sans peser. Ne pas bouger pour éviter les hypers post-prandiales. Lâcher prise, se rater, parfois. Et… vivre quand même.

Cette différence devient insupportable. Parce qu’elle remet en question un système de croyances qu’on a mis tant d’énergie à construire. Un système où « je contrôle = je fais bien ». Et si « l’autre fait différemment » mais va bien quand même… alors « est-ce que je fais tout ça pour rien ? »

Ce doute est vertigineux.
Alors on contre-attaque : on juge. On méprise. On impose.
Non pas parce qu’on est plus fort, mais parce que la simple existence d’un autre chemin menace la cohérence du nôtre.

La Skinny Gly a besoin de validation et de valorisation.
Et elle l’obtient en tentant d’écraser les autres voix, où en se confortant auprès de personnes qui vont confirmer que ce qu’ils font est super.

Skinny Gly, une espèce dangereuse ?

Culpabilité, honte et repli sur soi

Une attaque surprise d’un·e Skinny Gly laisse rarement indifférent. Vous étiez venus chercher du soutien ou des conseils auprès de la communauté des diabétiques, et vous voilà avec une tarte dans la gueule.

Une des raisons pour laquelle nous sommes sensibles à ces attaques est que le sujet de la santé nous touche tous. Personne ne se réjouit de vivre avec un Diabète mal équilibré. Il en va de notre survie, après tout.

En transférant leurs insécurités et peurs sur nous, nous en venons à remettre en question notre gestion du Diabète. Nous réévaluons nos priorités et réfléchissons à la pertinence de faire plus d’efforts ou même de sacrifices.

Dans cette logique toxique, l’hyperglycémie devient un aveu de faiblesse. Les plaisirs sucrés ? De l’inconscience. Un ressenti difficile ? Une excuse. Et l’erreur… une faute.

Le regard Skinny Gly porté sur les autres ne laisse aucune place à la nuance, ni à la complexité de nos vécus. Il ignore les maladies mentales, les troubles du comportement alimentaire, la fatigue chronique, les douleurs invisibles, le surmenage, les traumatismes, les parcours de vie… tout ce qui fait qu’on ne peut pas tous tout maîtriser. Tout le temps. Tous les jours.

Tout ce qui fait que chacun trouvera un équilibre différent entre contrôle, plaisir de vivre et imprévus.

Et ce regard-là peut faire mal.
Car il isole. Il culpabilise. Il décourage. Il pousse certains à ne plus oser parler de leur Diabète. À cacher leurs galères. À se taire plutôt que de risquer le jugement d’un « meilleur patient ».

Ce climat toxique n’élève personne. Il asphyxie.

Mais un monde où l’on ne peut plus dire « je galère » sans se faire corriger, ce n’est pas un monde qui soigne. C’est un monde qui exclut.

Les dessous de la Skinny Gly

Dans l’univers du Diabète de type 1, la frontière entre rigueur et trouble du comportement alimentaire est plus fine qu’on ne l’imagine (TCA). Et elle est trop souvent franchie, sans même qu’on s’en rende compte.

Les personnes qui glorifient le contrôle absolu, celles qui prônent la Skinny Gly, souffrent très souvent, elles-mêmes, d’un rapport troublé à la nourriture, à leur corps ou à la maîtrise.
Mais dans ce monde où le « contrôle » est valorisé, ces dérives passent inaperçues… voire sont applaudies.

Rappelons-nous cependant que derrière ces gestes « modèles », il y a souvent un mal-être profond, un besoin compulsif de tout cadrer pour ne pas s’effondrer.
Et ce mal-être, au lieu d’être entendu, se transforme en un discours normatif, culpabilisant… qui fait des dégâts.
Pour ma part, c’est là que mon empathie s’arrête.

Protégeons-nous

La raison pour laquelle je fais cet article, c’est que ces discours nous font du mal. À force d’être exposé·e à cette pression constante, « tu devrais », « t’as qu’à », « c’est pas si compliqué », on finit par croire qu’on est nul·le.

On se juge, on s’en veut, on redouble d’efforts. On commence à restreindre. On anticipe tout. On supprime les aliments « à risque ».
On évite les repas imprévus. On se méfie du gras, du sucre, des féculents. On calcule, on compense, on s’épuise.

Et parfois, on bascule. En plein dans les TCA.

Dans des mécanismes de contrôle extrême qui n’ont plus rien à voir avec la santé, ni mentale, ni physique. C’est très long après pour en sortir…

Lorsque vous avez des doutes sur certaines pratiques ou conseils, soyez vigilants et critiques : aujourd’hui on ne peut pas faire confiance aux pseudo experts sur les réseaux… (sans parler de ceux qui n’ont aucun scrupules, beaucoup sont simplement mal informés ou aveuglés par leur peurs et insécurités)

Entourez-vous de bons professionnels de santé. Ceux qui sont véritablement formés. Ceux qui savent lire une étude, et analyser sa crédibilité (Et oui, je sais que c’est parfois dur de les trouver, mais la Commu est aussi là pour partager les pépites).

Prenons bien soin de nous !

Diabète & TCA

Les personnes vivant avec un DT1 sont particulièrement vulnérables face aux TCA.

Parce que notre quotidien est fait de chiffres, de données, de corrections. Parce qu’on nous apprend à tout contrôler, sans jamais nous dire quand s’arrêter. Parce que certains discours entretiennent l’idée que la perfection glycémique est non seulement possible, mais attendue.

Or, le vrai équilibre, ce n’est pas l’absence de variation. C’est la capacité à vivre avec. À tolérer un peu de flou, à respirer entre deux courbes, à se respecter sans se surveiller en permanence. Après tout, quel intérêt il y aurait-il à tout avoir sous contrôle si cela nous empêche de VIVRE pleinement ?

Et vous, avez-vous déjà croisé la route d'un Skinny Gly ?

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Quand tout part en sucre

Quand tout part en sucre

Murphy 1 – Gisèle 0

Quand tout part en sucre

Asten Event 2022 - photo de groupe

Nul doute que vous la connaissez cette histoire. J’imagine que vous aussi, vous vivez des périodes où le karma semble vous en vouloir personnellement. Tout s’enchaîne, et il devient de plus en plus difficile de rester calme.

Bienvenue dans mes 10 jours de chaos logistique, glycémique, postal et émotionnel.

Prologue :

Conseil : ne vous relâchez pas pendant un déménagement

Tout commence il y a quelques mois, lorsque j’emménage dans ma nouvelle maison. Comme une grande, je prépare une petite valise DT1 pour tenir 20 jours, car la maison est encore travaux et je ne pourrais pas investir ma chambre de suite.

Spoiler : j’ai passé trois mois dans ma chambre d’amis avec 35 cartons en vrac.

Résultat, je pioche dans mes 3 cartons différents au fur et à mesure de mes besoins, sans mettre à jour mes stocks. « Plus tard », « ça va aller »… Je vis ma vie. Jusqu’à ce fameux dimanche.

Le jour où mon transmetteur Dexcom G6 rend l’âme.
Sans prévenir. Pas de message d’alerte en amont. Nada. Juste une alerte « bon chance » un peu brutale.

Je cherche dans mes cartons : pas de transmetteur de secours. Et ce n’est pas tout. Plus de capteurs non plus. Presque plus de cathéters.

Mais 4 boites de réservoirs.

Apparemment, on est nombreux à avoir un tiroir entier de réservoirs. Peut-être un jour aurons-nous le fin mot de ce phénomène, mais ce n’est pas le sujet.

Semaine 1 :

Collissimo de l’enfer

Honteuse et embêtée, je contacte mon prestataire de santé. Nous sommes dimanche, bien sûr. Encore une règle d’or, visiblement. Les galères, c’est toujours le soir tard ou les week-ends. Je mesure ma chance d’avoir des prestataires toujours disponibles et soucieux de m’aider au plus vite.

Un colis d’urgence est prévu pour le lundi matin, avec livraison prévue mardi ou mercredi. Sauf que… mercredi après-midi, rien.

Je rappelle mes prestas. Et là, ils m’envoient l’avis de dépôt : “Le colis a été livré à l’adresse indiquée.” Mais l’adresse… c’était mon ancien logement.

J’avais oublié de faire le changement.

S’ensuit alors une quête absurde, entre appels à mon ancien proprio (occupé bien sûr), traque du numéro du nouveau locataire (j’avais un numéro depuis un raté avec les croquettes de mes chiens, mais il n’est plus attribué!!), et messages vocaux dramatiques pour motiver les troupes.

Je parviens enfin à récupérer le colis.

Je rentre chez moi et dispose tout le matériel sur la table. Et là, angoisse pendant 30 min car je ne retrouvais plus mon téléphone dédié au Dexcom (le bougre s’était glissé entre la portière et le siège de la voiture) Je suis en sueur, mais je suis vivante et je vais enfin avoir ma glycémie !

Jour de répit

… avant l’apocalypse

Je change mon capteur. Il se connecte, il préchauffe. Je suis à 0.88 g/L. Une glycémie si poétique.
Je souffle. J’y crois.Je célèbre ce moment de calme.

Puis vient le lendemain.

Une hyper gigantesque débarque sans prévenir : 4 g/L +++.

J’ai pourtant mangé un repas correct. J’ai fait une correction. Je vais dormir, confiante.
Rien ne redescend.

Je passe la nuit à plus de 4 g/L, nauséeuse, déshydratée, à faire des corrections toutes les trois heures.

Quel dommage de ne réussir une courbe si plate qu’en de telles circonstances…

Après le capteur

…la pompe à insuline

Le lendemain matin, je suis au bout de ma vie. Toujours en méga hyper. Je me dis : « C’est le cathéter. » Je le retire. Et là… je saigne. Le cathéter était bouché.

Au moment de le changer, ma pompe m’échappe des mains et se démonte. Littéralement. Le socle s’ouvre, j’arrête de respirer.

J’essaie de rester calme. Mais la nausée de l’acidocétose me rattrape et je pars vomir.

Lorsque je reviens, je cherche ma pompe de secours. Mais c’est un ancien modèle qui fonctionne avec des piles au lithium.
Sur 12 piles : aucune ne fonctionne.
Certaines ne démarrent même pas, les autres sont déjà faibles.
Si proche du but…

 

Le retour si craint des stylos

Il est 7h30, je suis en acidocétose, j’ai vomis 3 fois et je suis énervée. Je n’ai pas le choix, je repasse au stylo à insuline, chose que je n’avais pas faite depuis 4 ans.

Mon corps n’est pas fait pour ça. J’ai besoin de débits variables heure par heure, de bolus fractionnés… Bref, je sais que ça sera l’enfer. J’envoie le rapport à mes prestataires, qui m’appellent et envoient un nouveau colis en urgence avec une nouvelle pompe.

Mais on est en plein week-end de Pâques. L’espoir de recevoir ma pompe avant mardi est très mince.

Et là, miracle, le colis arrive le lendemain matin. C’est terminé.

Et sinon,

…les heures miroir ?

Je vous ai dit que je voyais 4 à 6 heures miroir par jour depuis deux mois ? (10:10, 11:11, 12:12, etc.)
Sur mon téléphone, mon four, mon thermostat et aussi dans ma voiture… On dit que cela porte chance. J’ai déjà entendu des gens me dire « Gisèle, les anges te parlent ! ».

Les anges ne me parlent pas, ils me préviennent que ma vie va être un enfer. Ils hurlent depuis des mois !

Je me confie un instant… Depuis 2 mois :

  • j’ai découvert que la restanque de mon jardin menace de s’écrouler
  • je suis tombée en panne de voiture un vendredi à 20h
  • on m’a annoncé qu’un de mes chiens avait un cancer du poumon

Voilà. Si les heures miroir sont réellement l’annonce divine d’un futur évènement merveilleux, qu’il se manifeste maintenant !

Pourquoi

je vous raconte tout ça

Évidemment, comme tout bon français, j’aime me plaindre. Mais au-delà de cela, je trouve que cette semaine, c’est aussi la vôtre. Peut-être l’avez-vous vécu, peut-être la vivrez-vous un jour (je vous la souhaite moins riche quand même)…

Ce genre d’accumulations, ça arrive. Même quand on est organisé. Même quand on connaît tout par cœur.
Parfois, tout part en sucre.

Des soucis logistiques, du matériel défectueux, des arrachages de capteurs ou de cathéters, des allergies, un équilibre glycémique parti en fumée… Ce sont des choses qu’on peut tous·tes vivre.

Et malgré tout, on se relève, on fait ce qu’il faut. On assure. Et, quand c’est terminé, on peut même en rire.

Et toi, c’était quand, la dernière fois que tout est parti en sucre ?

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Le Diabète, au centre de tout ?

Le Diabète, au centre de tout ?

Le Diabète, au centre de tout ?

Quand on vit avec un Diabète de type 1, il est souvent au cœur de nos pensées. Entre calculs, anticipations et imprévus, il occupe une place importante. Mais cette place, justement, doit-elle être centrale en permanence ?

Avec Line Dumasdelage, psychologue clinicienne et elle-même DT1 depuis 22 ans, nous avons voulu explorer cette question !

  • Pourquoi se concentrer sur le Diabète peut être utile, voire nécessaire au début.
  • Pourquoi on a tendance à le garder au centre, parfois plus longtemps qu’on ne le pense.
  • Et enfin, quand cela devient un frein à notre bien-être et notre évolution.

Placer son Diabète au centre : un passage souvent nécessaire

Comprendre, observer, apprivoiser

Quand le diagnostic tombe, il bouleverse tout. Ce qui était inconnu devient une présence incontournable. Et comme face à un animal sauvage, il faut d’abord observer, comprendre ses mécanismes, apprendre à cohabiter avant d’envisager une coexistante pacifique.

Cette période est souvent accompagnée d’une colère profonde. Contre le Diabète lui-même, contre l’injustice de cette maladie, contre les efforts à fournir chaque jour pour un résultat jamais garanti.

Comme l’explique Line, cette colère est légitime et essentielle. Elle fait partie du processus de deuil d’une vie sans contraintes, et la traverser est une étape clé pour ne pas rester bloqué·e dans le rejet ou le déni.

Cette phase où le Diabète devient l’objet de toute notre attention est essentielle. Il faut intégrer les notions clés, apprendre le langage du DT1 :

  • Identifier les signes d’une hypo ou d’une hyper
  • Comprendre les effets de l’insuline, de l’alimentation, du stress et du sommeil
  • Expérimenter et décoder les réactions de son propre corps.

Cet apprentissage intensif est indispensable pour prendre confiance en soi et ne plus subir le Diabète. Plus on l’intègre, plus il devient intuitif, et plus on récupère de l’espace mental.

Une réponse à un besoin de maîtrise et de reconnaissance

Se plonger à fond dans son Diabète, c’est aussi une manière de reprendre le contrôle.
Quand une maladie impose ses règles, on a besoin de se réapproprier son corps en comprenant ce qu’il traverse.

Se sentir compris et soutenu

Le besoin de reconnaissance est aussi primordial dans cette phase. Une maladie invisible est une maladie qui nécessite d’être expliquée.
On parle beaucoup de notre DT1 pour légitimer ce que l’on traverse, pour que les autres comprennent l’épuisement, les montagnes russes, la charge mentale.

Et puis, il y a les autres DT1. La communauté, ce réconfort précieux où l’on peut partager nos galères, nos astuces, nos victoires. Vérifier qu’on est « normal » au sein de ce groupe.

L’échange permet de briser la solitude et de trouver des repères.

Avec l’explosion des réseaux sociaux, les espaces d’échange entre diabétiques se sont multipliés. Cela a permis de partager nos expériences, de nous reconnaître dans les autres et de trouver du soutien.

Échanger avec d’autres DT1 permet de se sentir moins seul·e, de valider nos ressentis et de confronter nos expériences :

  • Est-ce normal d’avoir peur des hypos ?
  • Est-ce normal d’être épuisé tout le temps ?
  • Est-ce normal d’en avoir marre parfois ? […]

La reconnaissance mutuelle et les conseils partagés jouent un rôle clé dans l’acceptation de la maladie. Mais jusqu’où est-ce sain ?

 

Quand le Diabète devient un refuge, un bouclier

Un exutoire pour exprimer nos frustrations

Le Diabète est une contrainte imposée, omniprésente, injuste. Il est donc logique que, lorsque quelque chose ne va pas, on le rende responsable.

« Je suis fatigué.e ? C’est à cause de mon Diabète. »
« Je n’arrive pas à faire telle activité ? C’est la faute à mes glycémies instables. »

Parfois, c’est vrai. Mais parfois, ce n’est qu’une partie de l’explication.

Le Diabète est une sphère parmi tant d’autres. Il impacte nos vies, mais il ne détermine pas tout. La fatigue peut aussi venir d’un rythme trop soutenu, d’une anxiété latente, d’un manque de sommeil.

En mettant tout sur son dos, on passe à côté de solutions qui pourraient améliorer notre bien-être global.

Le Diabète peut masquer des fragilités préexistantes

Le cas des TCA (Troubles du Comportement Alimentaire) est très parlant. Le Diabète de type 1 impose une relation particulière à la nourriture, qui peut accentuer ou révéler des difficultés préexistantes. Mais la cause profonde des TCA ne vient pas du DT1 lui-même : elle est souvent plus ancienne, plus ancrée.

Idem pour l’anxiété, le besoin de contrôle, la peur de l’imprévu. Ce sont des éléments qui peuvent être exacerbés par le Diabète, mais qui existaient déjà.

Prendre du recul permet d’identifier ce qui relève du DT1 et ce qui est lié à d’autres enjeux personnels.

L’illusion du contrôle et la fatigue du perfectionnisme

Rêver d’une courbe glycémique parfaite, c’est comme vouloir être un pancréas en CDI 24/7, sans jamais faillir.

C’est impossible et ingrat.

Le risque ? Une charge mentale épuisante, une rigidité qui devient contre-productive, et parfois même un burnout diabétique.

Le besoin de desserrer l’étau

Garder le Diabète au centre de tout, tout le temps, c’est finir par ne plus voir que lui. On alimente un cycle infernal de stress, de pression et de culpabilité, qui peut mener à l’isolement, la frustration et une vision limitée de la vie.

Apprendre à lui donner sa place, sans qu’il prenne toute la lumière, c’est aussi retrouver de l’air, de la souplesse, du plaisir.

Conclusion : Trouver son propre équilibre

Mettre le Diabète au centre n’est pas un problème en soi, c’est même une étape souvent nécessaire. Mais si cette phase devient permanente, envahissante, ou limitante, alors il est peut-être temps de réévaluer la place qu’on veut lui donner.

Le Diabète peut être un espace d’appropriation, de souplesse et de créativité. Lorsqu’il cesse d’être un alibi, il devient un élan vers autre chose.

Et vous, où en êtes-vous avec votre DT1 ?

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Line DUMASDELAGE

Psychologue clinicienne depuis 20 ans et DT1 depuis 22 ans, je me suis dit que mixer les deux pouvait être intéressant. J’ai choisi de développer une spécialité « diabète ».

L’annonce de la maladie est un choc qui n’est pas toujours simple à dépasser. La gestion du diabète est un effort plus ou moins important selon qui nous sommes, à quelle période de notre vie nous sommes, le cheminement que nous avons parcouru depuis l’annonce. Toutes ces périodes peuvent être sensibles et amener saturations, doutes, et épuisement.

Un accompagnement peut être bénéfique !